Pierre Favre : Le Boucher au grand cœur

10 décembre 2011

Pierre FAVRE

Seul, à la rue, Pierre Favre fait le vœu de connaître, ne serait-ce qu’une fois dans sa vie, une véritable histoire d’amour. Le vent tourne. Il chante avec les Garçons Bouchers.

Propos recueillis par Magali Germain

J’ai eu une enfance heureuse. Mes parents sont des gens charmants. Ils m’ont bien élevé, mais à l’adolescence, je me sens vraiment seul et mal dans ma peau. Je n’ai pas confiance en moi. Alors, je commence à m’alcooliser. Je tombe dans la punk attitude : « No future. » De plus en plus destroy, je suis pris dans l’engrenage d’une autodestruction. Je me vois devenir de plus en plus malheureux. Je me clochardise. Puis je rebondis. En banlieue parisienne, j’ai un emploi d’archiviste la semaine. Le week-end, je partage ma passion pour la musique rock sur les scènes alternatives. Le samedi soir, les concerts durent toute la nuit. On repart le matin au premier RER. Quand je suis saoul, je chante. Ça fait marrer Hadji-Lazaro le leader des Garçons Bouchers. Il me recrute comme chanteur du groupe en 1988. C’est l’époque de Vacarmélite ou la Nonne bruyante. On connaît une petite notoriété.

L’amour de ma vie
Un 31 décembre, je rencontre Géraldine. C’est une jolie poupée. On se revoit dans un concert. Je lui remets un énorme chèque. C’est ma façon de draguer. Elle vient habiter à la maison. Elle n’a pas 18 ans, j’en ai 26. Une fille comme elle n’aurait pas dû rester avec moi. Elle s’accroche. C’est l’amour de ma vie. On se marie. Un an plus tard, une fin de concert dégénère. Géraldine est blessée. À l’hôpital, on apprend tout en même temps : elle est enceinte et séropositive. Opération, anticoagulants, elle perd le bébé… À mon tour, je fais le test et apprends que je suis aussi porteur du virus. Cette malchance nous fait vivre une véritable histoire d’amour. On décide de se battre à deux. Le SIDA renforce notre amour. De 1996 à 2001, la santé de mon aimée se dégrade. Avec la maladie, elle souffre et devient faible : je découvre la tendresse. Pour moi débute une école du don et de l’accompagnement gratuit. Le virus touche l’encéphale de Géraldine. Elle plonge dans la mélancolie. Devenue maniaco-dépressive, elle est internée à l’hôpital Sainte-Anne. Tous les soirs, je prie le Bon Dieu pour qu’il m’aide à la soutenir et à l’accompagner. Je vais la voir tous les jours. Si je ne suis pas là pour lui faire sa toilette, personne ne le fait. Elle attrape la tuberculose. Puis un cancer prolifère. Elle meurt à 32 ans après avoir passé la moitié de sa vie à se faire soigner.
Le jour de ses funérailles, de retour à la maison, seul dans mon grand lit encore plein de son parfum, je n’arrive pas à dormir. Je découvre dans la table de nuit un petit livre. Je ne savais même pas qu’il y avait ça chez nous. C’est un petit livre de prières chrétiennes. En lisant l’Adoro Te, une hymne écrite par Thomas d’Aquin, chaque mot me parle. C’est très puissant, tellement puissant que j’ai peur. Je me dis : « Ça y est, je vais péter un plomb. » Depuis, il n’y a pas un jour sans que j’ouvre un bouquin qui m’aide à mieux prier le Christ. C’est devenu un besoin. Comme j’ai un look un peu particulier, on me demande de témoigner. Les gens qui vivent de belles histoires d’amour, il y en a beaucoup, mais la mienne est particulière. Et puis ce chemin de foi, c’est un chemin d’espérance que j’échange volontiers pour dire à ceux qui sont dans le mal-être et dans le malaise que rien n’est définitif. J’ai besoin de transmettre ça.
Déjà du temps des Garçons Bouchers, je m’étais forgé l’idée que les paroles, c’était bien, mais que les actes, c’était mieux. Dans sa maladie, Géraldine m’a imperceptiblement appris à l’accompagner. J’ai alors chopé un autre virus. Celui de me mettre au service des autres. Je me suis engagé au Secours catholique. Tout ça s’est fait naturellement. Mes anciens copains de rock doivent me prendre pour un grand malade. Ce n’est pas grave. Je ne casse plus du curé, je vais prier. Je ne chante plus dans les concerts, je chante à l’église. Ce n’est pas moins beau.

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